Administration Centrale
Bureau des Protocoles

Document : Référentiel Doctrinal (Statuts)

REF : THEO-2025-02 (RESUME Rectificatif)

DATE : 23/06/2011 (Rev. 2025)

AUTORITÉ : G. FALQUE

Définition et Historique de l’Art Protocolaire :
De l’Instruction Poétique à l’Instruction Administrative

1. L’Ancien Monde : Le Protocole comme « Partition » (1960-1990)

Historiquement, l’Art Protocolaire (Fluxus, Sol LeWitt) utilisait l’instruction comme une invitation à la liberté. L’artiste donnait une règle simple (ex: « Dessinez une ligne et suivez-la ») pour que chacun puisse créer une expérience poétique.

Le but était alors de libérer le geste. L’instruction était une « partition » ouverte à l’interprétation, un jeu intellectuel pour échapper à la lourdeur du monde matériel.

2. La Rupture : L’Ère de la « Réalité Scriptée »

Au XXIe siècle, la nature de l’instruction a radicalement changé. L’ère de l’auto-détermination normative est révolue. Nous vivons dans une « Réalité Scriptée » où des algorithmes nous dictent en permanence nos actions : « Tournez à gauche » (GPS), « Répondez à ce message » (Notifs), « Aimez ceci » (Réseaux).

C’est le phénomène du « Prompt Inversé »: ce n’est plus l’humain qui programme la machine, c’est la machine qui programme l’humain.

3. Le Nouvel Art Protocolaire (Réalisme Administratif)

Face à ce constat, le « Nouvel Art Protocolaire » (ou Art Administratif) ne cherche plus à créer de la poésie ou du jeu. Il opère un changement de fonction radical :

  • CE QUI CHANGE : De l’Expérience à la Certification
    Avant, l’important était de vivre l’action. Aujourd’hui, l’action est une anecdote volatile (« une rumeur ») si elle n’est pas enregistrée. Le but du Nouvel Art est de certifier que l’action a eu lieu.
  • CE QUI CHANGE : De l’Artiste à l’Institution
    La figure de l’artiste-démiurge est obsolète. Il devient un Greffier. Il utilise la froideur de l’administration non pas par ironie, mais parce que la bureaucratie est le seul langage capable de rivaliser avec le code informatique pour valider le réel.
  • CE QUI CHANGE : La Preuve > L’Acte
    Le dogme central est inversé : « Le Certificat est plus réel que l’Acte ». Dans un monde virtuel, la preuve de propriété (le NFT, le titre, l’acte notarié) a plus de valeur tangible que la chose possédée.

Ce nouvel art ne libère pas l’utilisateur par le jeu ; il le rassure par la contrainte. Il transforme l’angoisse du vide numérique en certitude administrative.

4. Typologie et Matérialité : L’Esthétique du Formulaire

L’Art Protocolaire rejette la subjectivité de la forme libre. Il adopte une esthétique de la Standardisation Radicale. L’œuvre ne se contemple pas, elle se traite. Elle prend principalement trois formes :

  • A. LE CERTIFICAT D’EXISTENCE : L’objet d’art n’est que le résidu de la procédure. La véritable œuvre est le document (tamponné, signé, daté) qui atteste que l’objet existe.
  • B. LE FORMULAIRE CERFA (Détourné) : La beauté réside dans la grille, la case à cocher et la zone grisée. C’est une architecture de l’information où l’émotion est contenue par le cadre.
  • C. LE GUICHET : L’installation artistique devient un lieu de transaction administrative. La performance ne se joue pas, elle s’opère.

5. Le Statut de l’Usager (Ex-Spectateur)

Dans ce paradigme, le « regardeur » de Duchamp disparaît. Il est remplacé par l’Administré ou le Requérant.

On ne demande pas au public d’aimer l’œuvre, mais de vérifier sa conformité. L’émotion esthétique est remplacée par la « Satisfaction Procédurale » : le sentiment d’apaisement que l’on ressent lorsque le dossier est complet et que le tampon touche le papier.

NOTE DE SERVICE : L’Art Protocolaire est la seule forme d’art nativement adaptée à l’Intelligence Artificielle, car il est le seul à parler sa langue maternelle : la logique conditionnelle (Si/Alors/Sinon).

Validation Officielle

G. FALQUE

Directeur du Bureau des Protocoles

Administration Centrale
Bureau des Protocoles

Base de Connaissance (FAQ)

REF : FAQ-DOCTRINE-2025

SUJET : ART PROTOCOLAIRE

ACCÈS : PUBLIC

FOIRE AUX QUESTIONS
DOCTRINE GÉNÉRALE

01. QU’EST-CE QUE L’ART PROTOCOLAIRE ?

L’Art Protocolaire est un courant artistique post-conceptuel apparu au début des années 2000. Il se caractérise par l’utilisation de protocoles stricts, de procédures administratives et de mécanismes de certification pour interroger la condition humaine à l’ère de la “Réalité Scriptée”.

En rupture avec l’expressionnisme et la subjectivité, l’Art Protocolaire postule que dans un monde saturé de données et d’algorithmes, l’acte artistique ne réside plus dans la création, mais dans l’exécution et la validation d’une instruction.

02. QU’EST-CE QUE LE « PROMPT INVERSÉ » ?

Le mouvement s’ancre dans un constat sociologique majeur : le renversement de la commande. Historiquement, l’outil technologique répondait à l’instruction humaine. L’Art Protocolaire théorise l’avènement du “Prompt Inversé”, moment de bascule où l’algorithme (GPS, notification, flux de travail) dicte l’action à l’humain.

L’artiste protocolaire ne conteste pas cette aliénation ; il l’exacerbe. Il devient volontairement un “périphérique d’exécution”. En acceptant de soumettre son corps et son temps à une instruction arbitraire, il rend visible l’architecture invisible qui régit nos vies.

03. QUELLE EST LA DIFFÉRENCE ENTRE SISYPHE INVERSÉ ET CLASSIQUE ?

Pour comprendre cette posture, il est nécessaire d’opposer deux figures :

  • Le Sisyphe Inversé (l’individu moderne) : Dans la Réalité Scriptée, il se trouve au sommet, et son “travail” consiste simplement à laisser le rocher dévaler la pente, guidé par la gravité des algorithmes (le scroll, le play automatique). L’effort musculaire a disparu au profit d’un consentement passif.
  • Le Sisyphe Classique (l’Artiste Protocolaire) : À contre-courant de la fluidité numérique, il réintroduit volontairement la friction et l’effort. Qu’il s’agisse de marcher avec un caillou dans la chaussure ou de jeter un pavé, il est celui qui recommence à “pousser le rocher”.

Pourquoi ? Parce que dans un monde où tout glisse, l’effort est la seule preuve tangible de l’existence. Le Bureau des Protocoles ne certifie pas la facilité ; il certifie la dépense d’énergie humaine inutile et magnifique.

04. QUELLES SONT LES DIFFÉRENCES AVEC L’ART CONCEPTUEL ?

Bien que s’inscrivant dans la lignée de l’Art Conceptuel des années 1960 et 70 (Sol LeWitt, On Kawara), l’Art Protocolaire opère deux ruptures fondamentales :

  • De la Partition à l’Injonction : Là où Fluxus ou John Cage proposaient des “scores” laissant une part au hasard et à l’interprétation ludique, l’Art Protocolaire impose une rigueur binaire. L’instruction n’est pas une suggestion, c’est un code à exécuter sans faille (if/then/else).
  • Du Concept à la Preuve : L’Art Conceptuel cherchait la dématérialisation de l’objet d’art. L’Art Protocolaire, au contraire, fétichise la “trace administrative” (le certificat, le tampon, l’enregistrement en base de données). L’objet n’est pas l’œuvre, mais la preuve que l’œuvre a eu lieu.
05. POURQUOI UTILISER UNE ESTHÉTIQUE BUREAUCRATIQUE ?

L’Art Protocolaire fait de l’administration son médium plastique. Il emprunte ses codes visuels et structurels à l’univers du notariat, de la juridiction et de la comptabilité.

  • Le Vocabulaire : Les termes “œuvre”, “collectionneur” ou “inspiration” sont remplacés par “Actif”, “Mandataire” et “Instruction”.
  • La Forme : L’esthétique est froide, clinique, standardisée. Le formulaire Cerfa, le rapport d’incident ou le relevé de données deviennent des supports artistiques majeurs. Cette neutralité de surface contraste avec la violence ou l’absurdité de l’action physique réalisée.
06. QUELS SONT LES TYPES DE PROTOCOLES ?

Bien que les pratiques varient, l’Art Protocolaire classifie généralement ses œuvres selon trois axes opératoires :

  • Le Protocole d’Action (Performance Déléguée) : L’artiste exécute une tâche physique, souvent répétitive ou sisyphéenne, pour le compte d’un tiers. L’effort biologique est converti en valeur artistique.
  • Le Protocole Biologique (Substitution) : L’artiste loue ses fonctions vitales. Il dort, mange, boit ou s’expose au danger à la place du commanditaire. Il s’agit d’une externalisation de l’expérience sensible.
  • Le Protocole de Donnée (Génération) : L’œuvre est une pure production de certitude mathématique ou algorithmique (génération d’un point, d’une date, d’un certificat de non-existence).
07. QU’EST-CE QUE LE MARCHÉ DE LA CERTITUDE ?

L’Art Protocolaire propose une critique radicale de la valeur. Ce que le collectionneur acquiert n’est pas l’expérience esthétique (qui a été vécue par l’opérateur), mais le Titre de Propriété de cette expérience.

Le mouvement postule que le “Certificat est plus réel que l’Acte”. Dans une société de l’information, la vérité n’est pas ce qui est vécu, mais ce qui est enregistré. L’Art Protocolaire vend de la “réalité certifiée”. Il transforme l’anecdote (une émotion, un geste fugace) en un “Actif Conceptuel” pérenne, stocké et archivable.

08. QUELLE EST LA FINALITÉ PHILOSOPHIQUE ?

En dernière analyse, l’Art Protocolaire est une métaphysique de la preuve. Face à l’effacement du réel par le virtuel, il tente de “poinçonner” l’existence.

Il ne cherche pas à divertir, mais à rassurer par la contrainte. En créant des juridictions artificielles (bureaux, registres), il offre un cadre où les faits, même absurdes, sont sauvés du néant par la puissance de l’enregistrement.

Validation Officielle

G. FALQUE

Directeur du Bureau des Protocoles